Vallauris, 1948. Pablo Picasso, alors au sommet de sa gloire, s’installe dans cette petite ville de potiers, accompagné de Françoise Gilot et de leurs deux enfants, Claude et Paloma. À la Villa Galloise, il poursuit son travail artistique, notamment pour le musée Picasso d’Antibes. Mais c’est une autre flamme qui va le consumer ici : la céramique.
Dans l’atelier Madoura, il redécouvre avec fascination un
art local en déclin. En moins d’un an, il crée près de 2000 pièces,
redynamisant l’artisanat de Vallauris. La ville devient un haut lieu
artistique, et ses poteries des objets cultes pour les touristes de la Côte
d’Azur.
Au fil des années 1950, le 25 octobre — date de naissance de
l’artiste — devient fête populaire. Une corrida sans mise à mort clôt les
célébrations de celui qu’on appelle ici « Don Pablo ». La tradition
s’interrompt, mais ressuscite aujourd’hui sous le nom de Fête Picasso.
Picasso n’est pas un inconnu de la région : dès les années 1920, il visite la Côte d’Azur en touriste. Mais c’est après la guerre, membre du Parti communiste, qu’il s’y installe durablement. À plus de 60 ans, il ne cherche plus à dissimuler sa calvitie, mais continue de courir les jeunes femmes. « Pablo a des besoins sexuels démesurés », dira Françoise Gilot, sa compagne.
Ce désir obsessionnel imprègne son œuvre tardive, jugée par
certains critiques plus lubrique que lumineuse. Les tableaux de cette époque
montrent des corps noués, des scènes d’amour frénétiques, loin du cri désespéré
de Guernica (1937), souvent considéré comme son dernier chef-d’œuvre universel.
A Vallauris, il entame une liaison avec Geneviève Laporte,
17 ans, venue l’interviewer pour un journal scolaire. Françoise découvre la
trahison et le quitte en 1953. Picasso ne lui pardonnera jamais. Il
instrumentalise leurs enfants dans une stratégie de vengeance affective et
affectera jusqu’à la suite de leur vie.
Dans les années 1960, il s’installe à la Villa La Californie
avec Jacqueline Roque. En 1961, il prend tout le monde de court : alors que
Françoise entame un divorce avec Luc Simon, il épouse en secret Jacqueline,
scellant la rupture définitive avec la mère de ses enfants. Il finit ses jours
dans la Villa Nôtre-Dame-de-Vie à Mougins.
A sa mort, le 8 avril 1973, la fracture familiale est telle qu’aucun de ses enfants ou petits-enfants n’est autorisé à assister à ses obsèques. Son petit-fils Pablito tente de se suicider, et meurt quelques mois plus tard. Paulo, son fils, disparaît en 1975, rongé par les excès. Marie-Thérèse Walter, son ancienne muse, se pend en 1977. En 1986, Jacqueline Roque met fin à ses jours.
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